Il pleuvait aujourd'hui et le vent soufflait fort, la toute première tempête d'automne...
En soirée je fais quelques courses au hard-discount du coin ; puis vient le moment redouté du passage à la caisse,(il faut être ultra rapide pour récupérer ses paquets après le passage à la caisse car le tapis est très limité et le caissier a des ordres pour faire le plus vite possible, ça s'appelle la productivité).
Devant moi un couple de gens de couleur, dont le total des achats se montent à 72 €, demandent au caissier d'en enlever quelques-uns car ils ne peuvent dépasser 50€.
Le caissier s'énerve, quelques échanges de paroles tendues, des regards et des soupirs excédés de sa part me mettent mal à l'aise, les autres clients à leur tour commencent à remarquer le mini-drame qui se joue dans ce magasin de la morosité.
L'ambiance n'est pas à la fête...
Arrive mon tour, le caissier qui a essayé en vain de me rendre complice par un ou deux regards appuyés, les yeux levés au ciel, des gestes énervés, en est pour ses frais, sans prendre partie je n'ai pas aimé sa façon de se comporter envers ces gens.
Je pense que cela n'est déjà pas facile pour eux de montrer qu'ils ne peuvent dépenser plus d'une certaine somme, alors leur reprocher de ne pas l'avoir dit au bon moment je trouve ça nul...
« Désolé Madame pour l'attente !
- Non pas de problèmes
- Si tous les clients faisaient comme ça on aurait pas fini !
- Vous devez être fatigué par vos conditions de travail (j'ai vu plusieurs reportages sur la gestion des hard-discount et notamment sur le rythme infernal demandé au personnel)
- Oui, c'est la fin de la journée !
- Mais vous savez ils n'ont sûrement pas fait exprès !
- Oui mais je n'ai pas aimé la façon dont elle a balancé les paquets.
- Ah ? Je n'avais pas vu ça, évidemment ce n'est pas agréable pour vous. Pour eux ce ne doit pas être facile non plus... et puis la fatigue de votre travail..."
Quelques phrases, un apaisement, une meilleure compréhension des différentes situations, le caissier me sourit et me souhaite, selon la formule consacrée, « une bonne fin de journée », l'amertume est partie pour un temps.
A la sortie, un jeune homme fait la manche, il me suit jusqu'à la voiture et quand il me demande quelques pièces je lui tends un paquet de gâteaux « non merci j'ai déjà mangé, gardez-le pour vos enfants » « non prenez-le, je préfère vous donner ça... » « merci je le mangerai ce soir alors »
Ca se passe à St-Nazaire, ville moyenne, un soir d'octobre 2010 : un échantillon de petites tranches de vie quotidienne comme celles de bien des Français : manque de moyens, fatigue nerveuse au travail où la moindre minute est comptée, précarité...
Jacinte