Cinquante jours avant le grand départ pour son périple de course à pied de St-Nazaire jusqu'à Lassah, au Tibet, Stéphane Héloir ne désire plus qu'une chose : rentrer dans la peau d'un coureur humaniste, pour un voyage de l'intérieur vers l'extérieur.
Le 4 juin prochain, l'édition 2011Grande Marée lui donnera le top départ.
Stéphane partira de Villès Martin, accompagné sur le Front de mer par tous ceux qui l'ont aidé à préparer ce défi sportif et humain, et ils sont nombreux ! Des personnes qu'il côtoie dans son travail au Croisic au centre de St-Jean de Dieu, des écoliers qui vont le suivre virtuellement dans son parcours, des partenaires, de gens de la mairie de St-Nazaire, des amis sportifs de son club de course à La Baule... tous ont voulu être à ses côtés sur les premières centaines de mètres de son long chemin.
Par la suite, pour la traversée de la France, Stéphane sera accueilli dans de nombreux clubs de course, tous ont répondu présent et sont fiers de participer à leur manière à son défi.
Les baskets de Stéphane traverseront ensuite pas moins de douze pays de l'Italie du Nord au Tibet. Se mettre dans la peau d'un homme qui va courir durant 15 OOO kms ce n'est pas rien !
Stéphane y pense tout au long de ses différentes activités quotidiennes. Tous les gestes banals que l'on fait souvent sans y réfléchir, lui au contraire, les voit déjà d'un autre oeil.
Quand il se rase le matin, il sait qu'il ne pourra le faire aussi souvent car bien entendu il n'est pas question d'encombrer son sac de gel de rasage et autre nécessaire de toilette... un barbier de temps en temps fera l'affaire, ce sera une occasion de communiquer, le but de son voyage.
Quand il déjeune, il sait aussi qu'il devra s'adapter au pays traversé et aux habitudes alimentaires de ses hôtes. Pour lui qui désire justement s'immerger dans ces cultures différentes, ce sera un des moments forts de partage, de rencontre. Il emporte avec lui quelques fruits secs déshydratés qu'il fera tremper dans l'eau de sa gourde avant de les consommer. Un récipient lui servira de bol-assiette, un seul couvert fera office de fourchette-couteau-cuiller. Stéphane ne mange habituellement que très peu de viande et des produits simples et naturels.
Il a pensé aussi aux "petits bobos" et emporte avec lui quelques flacons d'huiles essentielles, il est adepte de la médecine naturelle.
Quand il s'entraîne à la course, il pense bien sûr aux nombreux kms qui l'attendent mais aussi aux paires de baskets qu'il va user... à celles qu'il emportera avec lui, deux dans son sac et les autres dans des relais.
Quand il prend une douche, il sait que c'est un luxe qu'il ne pourra s'offrir souvent. L'eau est rare et précieuse dans de nombreux pays et les habitants ne la gaspillent pas comme nous. Il faut partager, respecter, alors ce sera le plus souvent avec un filet d'eau et le savon de marseille. Ce même savon remplacera aussi la machine à laver pour nettoyer les deux shorts, maillots et chaussettes qu'il emporte avec lui.
Son aventure sportive est donc avant tout une aventure humaine, et le défi, s'il est bien physique, est aussi celui-ci : une autre façon de "consommer" ou plutôt de ne pas le faire !
Stéphane ne fréquente plus les hypermarchés depuis un moment déjà, dégoûté par ces étalages de marchandises.
La longueur du rayon "animaux" par exemple, me désespère ! Ont-ils besoin de boîtes luxueuses au saumon, thon etc...? Alors que beaucoup d'hommes ont faim dans le monde, que les 3/4 de la planète vivent très simplement ? Nos magasins regorgent de choses inutiles, c'est choquant ! Je ne me retrouve plus dans cette société de consommation, c'est une des raisons qui m'a donné l'envie de faire ce défi.
De l'inutile Stéphane n'en aura guère la place dans son sac de...6 Kg ! Tout a été pensé au minimum et cela grâce à l'aide d'un homme, qui ayant lui-même beaucoup voyagé, a eu l'idée d'ouvrir à Nantes un magasin spécialisé dans le "ligth". Ainsi le sac de couchage ne pèse que 600 g, la veste de pluie 200 g, et le reste à l'envie : tapis de sol, deux maillots, deux shorts, un collant, veste polaire, gants, bonnet, recharge solaire, purificateur d'eau, brosse à dent, savon. Un minimum pour une aventure humaine maximum !
Quand il s'endort le soir, tout naturellement Stéphane savoure le confort de son lit et se doute que cela lui manquera parfois, allongé dans son sac de couchage sur le tapis de sol.
L'aventure est ainsi : entre joies et difficultés au quotidien mais c'est cela qui le pousse en avant !
Les risques ? Bien sûr il y en a mais quand je prends ma voiture pour aller travailler le matin, de St-Nazaire au Croisic, n'y-a-t-il pas autant de risques ? Le danger est nulle part et partout et quand on voit ce qui se passe autour de nous, ce qui peut arriver du jour au lendemain...
J'ai vécu dans un milieu sportif ou le dépassement de soi et le partage avaient une grande place.
Ce qui sera le plus délicat : garder le contact. Les cyber-cafés ne sont pas légions dans certaines contrées et le portable a ses limites. Je pense bien sûr particulièrement à mes proches, mes parents âgés et mes grands enfants, une absence entre 13 et 18 mois c'est beaucoup. On en a souvent parlé ensemble pour évacuer les craintes. De nos jours les distances peuvent être facilement reliées, et s'il le faut, en deux jours d'avion je peux être de retour. C'était le moment d'y aller, il faut aussi savoir penser à soi sinon on ne réalise jamais ses rêves.
Deux pays seront plus délicats à traverser : l'Iran et le Pakistan, mais je ne forcerai pas le destin, je prendrai s'il le faut bus ou camion militaire dans certaines zones où il ne sera pas possible de courir. Je me suis bien renseigné sur les blogs et des sites de camping-car, et si je pars sans étapes toutes faites, je ne pars pas au hasard dans ces pays-là. Une nantaise et ses deux enfants, font pendant la même période à peu près le même parcours et il y aura possibilité de se rejoindre de temps à autre, pour les nouvelles ou l'intendance (il me faut dix paires de baskets !).
Communiquer, rencontrer, partager sont les maîtres mots de Stéphane. Il veut faire de son aventure sportive une passerelle vers l'autre, ses différences, ses richesses.
Il a beaucoup préparé son voyage sur le net. D'autres humanistes parcourent le monde avec cette philosophie. Leurs conseils lui ont été précieux pour la préparation de son voyage. Le témoignage de Jamel Balli, un marathonien qui a fait de nombreux reportages photos et a écrit des livres, ainsi que celui d'Astrid wendlandt, une journaliste-écrivain canadienne qui vit au milieu des Inuits, et qui a écrit "Voyage au bord du monde"...
Se retrouver à l'essentiel, voyager de l'intérieur vers l'extérieur, au-delà du défi sportif vers les rencontres, ce sont des maximes que Stéphane a fait siennes pour se préparer mentalement à courir bien au-delà de lui-même.